Marseille: IAM ou les papas du rap français à la maison

Article : Marseille: IAM ou les papas du rap français à la maison
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25 octobre 2013

Marseille: IAM ou les papas du rap français à la maison

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Crédit photo : Kelly Julio

Il  y a des rendez-vous que l’on ne peut pas manquer. Celui-là était l’un d’eux. Même après un avion raté, une fête de Tabaski passée et une folle envie de rester à Dakar, je l’ai honoré.Trois ans que j’attendais ça. IAM – en concert – à Marseille –  vendredi dernier. Sans doute le dernier…

La citée phocéenne devait encore être ma ville ce jour là, comme elle était encore la leur, pour un Dernier coup d’éclat.

Pour cet art brut fils des bas fonds, poésie de ces temps, résistant aux vents violents, martelant mes tempes de ces tas de phrases torturées, ces feuilles raturées (« Dernier coup d’éclat »).

Le destin en a voulu ainsi. J’ai finalement réussie à prendre un autre avion pour arriver en temps et en heure jusqu’au Dock des Suds de Marseille où avait lieu le concert.

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Crédit photo : Kelly Julio

Étrangement, je n’étais pas la seule ce soir là. A croire que le tout-Marseille s’était donné rendez-vous, tant la salle était bondée. Je ne m’étais pas préparée à un tel bain de foule à l’accent chantant. Le temps de réaliser où j’étais et je me suis laissée embarquer par le flow

Car ils nous l’ont prouvés, ceux qui dansaient le MIA au début des années 80 en survêtement Tacchini et Mocassin Nebuloni n’ont rien perdu de leur classe et de leur verve. Si leur dégaine de Bad Boy de Marseille s’est faite plus sage, c’est peut-être que les papas du rap français ont depuis roulés leur bosse à L’école du Micro d’argent, comme l’indique le nom de leur troisième album, et à l’école de la vie.

La bande passante – 20/04/2013 – 1ère partie

(19:29)

Ils ont commencé à rapper en 1988, soit très peu de temps après ma naissance, en y réfléchissant bien. Pourtant, lorsque j’écoute leurs premiers titres,  Je danse le MIA, Red Black and Green, Planète Mars, Nés sous la même étoile… c’est comme si j’avais l’impression qu’ils incarnaient parfaitement ma génération.

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Crédit photo : Kelly Julio

Et j’ai aussi eu cette impression vendredi soir en les écoutant en live, comme s’ils représentaient exactement ce que le rap français est à mes yeux… Loin, très loin de ce que j’entends parfois aujourd’hui à la radio. Choc générationnel, On y est. C’est avec ce genre de constat que l’on se rend compte que l’on vieillit, que l’on n’est plus à l’âge des jeux de bille et des goûters aux pains au chocolat. Comme en regardant nos idoles d’hier nous parler des problèmes d’aujourd’hui.

« Désintégration » le mot est lâché par Akhenaton, lors de la présentation de leur album sur RFI, en parlant de la phrase qui a inspiré le titre de la chanson Pain au chocolat. Elle était de Jean-François Copé, mais il y en a eu tant d’autres, de ces phrases assassines de nos politiciens, venant pointer du doigt les français d’origine coupable, pour un coup médiatique destiné à relancer leur place dans les sondages ou a capter les voix de leur électorat le plus à droite. Les conséquences sont désastreuses et c’est ce qu’a voulu expliquer IAM avec ce morceau.

La bande passante – 20/04/2013 – 2ème partie

(26:30)

Dénoncer, ils essaient de le faire sans trop d’amertume pour ne pas devenir aigri, par les histoires de vie, le contexte de Marseille des années 80 dans lequel ils ont grandi, les contextes familiaux et les parcours de certains parfois difficiles… autant d’éléments qui les ont poussé à écrire. Ainsi, ils n’ont pas hésité à monter au créneau pour dénoncer les dérives d’une ville qui s’est notamment fait connaître grâce à la culture du Hip-Hop mais qui l’a oublié dans sa programmation de capitale européenne de la culture 2013.

Un ville dont ils sont fiers d’être les enfants, souvent stigmatisée et qui s’enferme parfois elle-même dans une image de mauvaise-fille, par la rumeur et la désinformation. Une ville où assis sur les terrasses on cherche les yeux dans les étoiles où est la foi pour ne pas mettre les voiles (« Notre Dame veille »).

Si parfois leur encre se fait amère, ils essaient de l’adoucir avec des notes d’espoir ou de dérision. C’est un peu l’équilibre que j’essaie de trouver dans mes textes. Le parallèle est facile, je vous l’accorde, car ils jouent avec les mots comme j’aimerais pouvoir le faire et ils demeurent toujours un exemple à suivre, par leur parcours mais aussi par leur intégrité et leur engagement.

La bande passante 3 – 20/04/2013 – 3ème partie

(19:30)

Cet album « Arts martiens », avant le dernier qu’ils sont venus nous présenter à la maison, est comme le signe de nouveaux combats pour lesquels ils ont repris le mike, « par devoirs envers leurs enfants ». Comme si leur dernier retour signifiait qu’il y a encore des choses à dénoncer. Trop peut-être.

L’inspiration, ils la trouve dans l’injustice, le racisme, la corruption, les malversations… Tristes réalités toujours d’actualité vingt cinq ans plus tard, pour eux ou pour leurs petits frères.

La bande passante 4 – 20/04/2013 – 4

(26:31)


A Marseille et ailleurs, on est encore aujourd’hui loin de l’idéal de la France Black-Blanc-Beurre de France 98, lorsque Zizou était notre héros national et que son portrait trônait encore sur la façade de l’immeuble de la corniche. Parce que depuis, il a été recouvert, et dans le même temps s’est enfoui le mythe d’un pays qui n’aurait pas de couleurs. Si ce changement de cap, comme un changement de siècle, on le ressent dans les textes d’IAM, c’est aussi ce que l’on perçoit dans le regard des gens, lorsque l’on s’éloigne un peu de l’hexagone.

Loin de jouer les moralisateurs, les rappeurs d’IAM aux noms de pharaons viennent nous conter leurs expériences, poser leurs questionnements et nous expliquer les raisons de la colère. 

Parceque peace love et having fun (paix, amour et plaisirs) sont devenus bitch, drogues et heavy guns (chiennes, drogues et armes lourdes). Rares sont ceux ceux qui ont des roses à offrir. Bienvenue[…] où le sens de la vie s’est égaré dans la brume, où les petits ne savent pas poser un nom sur un légume. (« Les raisons de la colère »)

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Crédit photo : Kelly Julio

Alors lorsque nous aussi nous cherchons des réponses, il est bon d’écouter leurs textes et d’y puiser les ressources pour avancer. Et à mon sens, c’est ici que l’on reconnaît les grands artistes des modestes chanteurs, lorsque leur art est non seulement beau et puissant, mais surtout lorsqu’il agit sur le spectateur qui ne se contente pas de l’écouter, mais plutôt de le vivre.

Les lumières se sont éteintes sur le Dock des Suds, mais les artistes nous ont laissé avec leurs textes, pour aller y puiser l’inspiration et exorciser notre nostalgie d’une époque révolue… Alors qu’une autre est encore à construire.

On pense plus à demain qu’hier. En quête du bonheur suprême, chacun se bat pour lui. Certains l’espèrent du fond de leurs prières. Un beau jour il débarque évident comme l’évidence et devenu tellement rare. (« Après la fête »)

Le dernier album d’IAM sortira le 18 novembre 2013  et leur premier extrait « Si j’avais 20 ans » sera disponible ce 25 octobre ici.

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Commentaires

Limoune
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Ohhh pas mal d'avoir assisté au concert retour. Merci pour ce partage. Avant de rentrer, je les entendais à la radio, ça fesait bizarre, je les avais trouvé assagi et leur style avait un peu changé, mais ça c'est pour le morceau qui passait en boucle sur les ondes. Il me faut maintenant écouter l'album

Belmous rappeur ivoirien vivant en Côte d'Ivoire actuellement
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On doit nous tous collecter tous les albums de IAM que ce soit les projets du groupe ou les solos parce que ce groupe représente ce qu'il y a de plus pûre comme rap en France.Ils nous instruise sans nous offenser avec une certaine banalité ou vulgarité digne d'éternels adolescents.Dites leur qu'il y a du fric à se faire en Côte d'Ivoire pour une multinationale qui veut s'installer dans le secteur audiovisuel compartiment rap et que je suis prêt à les aider à s'assurer une bonne retraite bien méritée en Côte d'Ivoire où ils pourront assurer un meilleur paradis fiscal et une source de richesse pour leurs descendants.C'est tout.

Belmous rappeur ivoirien vivant en Côte d'Ivoire actuellement
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big up.