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Journée Mondiale du blog : que représente le blogging pour les Mondoblogueurs ?

Crédit photo : Mondoblog
Crédit photo : Mondoblog

Le 31 août 2013 marque la Journée Mondiale du blog. Depuis quelques années, des personnes de toutes les sphères font appel à ce moyen de communication, devenu incontournable pour communiquer, dialoguer, présenter leurs produits,… Les Mondoblogueurs ont décidé d’immortaliser cette journée de la manière la plus simple possible : répondre à la question suivante : que représente le blogging pour vous ? Ce billet qui a vu la contribution de plus d’une dizaine de Mondoblogueurs donne les points de vue de ceux qui ont participé à l’édition de cet article.

1-Limoune, Tunisie
Dernièrement, j’entendais un étudiant de l’école nationale de journalisme de Tunis s’insurger de l’inutilité du blog après la révolution. Un futur journaliste contre le blogging. Contre la diversité des points de vue rendue possible par Internet et la levée de la censure. Le blogging pour moi, c’est le bouleversement du schéma traditionnel de l’information, la fin du monopole des médias, la possibilité donnée à chaque citoyen d’avoir son mot à dire dans l’espace public.
 2-Salma Amadore, Cameroun
Le blogging pour moi représente une activité qui me permet d’exercer le journalisme que j’ai toujours voulu, celui qui part des faits et des expériences des gens pour parler d’un sujet. Tenir un blog me permets de m’exprimer comme je veux, sans trop de sévérité. Pour moi qui a l’expérience des rédactions, j’ai été très frustrée des fois, de devoir réécrire ou mettre aux oubliettes un article à cause « de la ligne éditoriale » du journal. En bloguant, je suis libre, je suis moi, je suis l’autre qui me lis et veut aussi me dire sa part de réalité. Loin de la routine des autres canaux d’information qui nous plongent dans la routine avec des mêmes personnalités, les mêmes stars, le blog est proche de l’homme ordinaire, c’est l’homme ordinaire qui est au centre du blog, celui qui veut s’exprimer et ne le peut pas dans les chaines officielles, trouve dans le blogging, le moyen de s’exprimer, d’échanger et de s’enrichir de nouvelles connaissances.
3-Baba Mahamat, Centrafrique
Il ne fait aucun doute, le blogging a inévitablement changé la face du monde. Le blogging est devenu une forme d’expression très prisée par des personnes et structures dans divers domaines. Il permet d’échanger avec les lecteurs qui participent à son animation. Il y a dans le blogging, l’esprit de mettre les lecteurs au centre en interagissant avec eux grâce à des commentaires et d’autres formes de partage. Ce qui le rend différent du média traditionnel est le fait que n’importe qui peut tenir un blog et ce, sans une formation préalable contrairement au journalisme par exemple. Une manière de communiquer est née grâce au blog, le journalisme-citoyen. En Centrafrique où les événements ont complètement  bouleversé la vie de paisibles citoyens, bloguer me permet de brosser la situation extrêmement difficile que vivent mes concitoyens et en profiter pour dénoncer une tragédie oubliée par la communauté internationale, qui aurait pu être évité si l’intérêt du peuple était au centre des préoccupations, au détriment des considérations personnelles.
4-Josiane Kouagheu, Cameroun
Bloguer pour moi, c’est tout simplement être moi. Ecrire pour dénoncer et interpeller, sans mensonge et sans maquillage.
5-Osman Jérôme, Haïti
Sans trop de crânerie, je dirais que, le blogging est pour moi, ce que la raison est pour le philosophe. Car cela me permet de pénétrer  la profondeur de la réalité quotidienne de mon paysRéalité dont j’essaie de parler sur mes blogs avec un ton un peu différent des médias classiques.
Depuis le jour où j’ai commencé à bloguer pour de vrai, je ressens  que, quelque chose a changé en moi en tant que citoyen. Après plus de deux ans de d’activité, désormais, je me sens plus engagé, plus concerné dans la lutte de la nouvelle Haïti, dont je suis un fanatique.
6-Mylène Colmar, Guadeloupe
Lancer un blog, écrire un billet, puis un autre, et encore un autre, en veillant à se renouveler, à livrer des informations (de son point de vue) intéressantes, à garder un œil critique. Animer un blog, lire les commentaires des lecteurs, se réjouir des compliments, répondre aux questions, défendre son point de vue et faire entendre sa voix. Tenir un blog, avec difficulté, parfois, avec plaisir, souvent, avec sincérité, toujours.
7-Pascaline, France
Deux ans. Voilà deux ans que j’écris et que le blogging à pris une place de plus en plus importante dans ma vie. C’était d’abord une distraction, un moyen pour moi de prolonger mes écrits universitaires d’une manière beaucoup plus ludique, en racontant et en vivant de belles sorties culturelles. Puis, c’est aussi devenu un moyen de compter ma vision du monde, mes voyages, mes passions tout en réfléchissant au regard que je portais dessus, en le déconstruisant. Aujourd’hui, c’est devenu un biais indispensable par lequel je développe ma pensée, mes idées, en les confrontant aux lecteurs. Leurs réactions me font avancer, réfléchir, remettre en question dans mon écriture mais aussi dans cette vision du monde. Indispensable donc, pour demeurer une « femme qui interroge ».
8-Aurore, Allemagne
Le blogging ou la valise 2.0.
Bloguer, c’est plier, empiler et ordonner au fond d’une valise virtuelle et planétaire des souvenirs, des avis, des incertitudes, des débats, des rencontres, des tous et des riens, des pleins et des vides, du futile, du sérieux, des histoires, de la poésie, des coups de gueule, des coups de joie, des injustices, des dénonciations, des déceptions, des messes basses, des combats, des confidences, des incertitudes, des Révolutions…
9-Serge de Suza, Benin
Blogueur par passion
C’est à la faveur d’un stage en médias et démocratie à Copenhague au Danemark en octobre-novembre 2010 que je me suis essayé au bloging. Ma passion pour le web journalisme me  permettra plus tard d’intégrer la deuxième édition de Mondoblog où, grâce à un encadrement judicieux, j’ai pu véritablement apprendre le b, a, ba, les contraintes et les exigences du blogging et de la publication en ligne.
Après la formation MondoblogDakar 2013, je revisite régulièrement mes connaissances à l’aune des innovations majeures, des mutations et des nouveaux développements du secteur médiatique, au jour le jour en tant que blogueur.
Aussi, pour moi, le blogging est une manière d’être, une forme d’expression parmi tant d’autres et pourquoi pas, un formidable espace d’échange, de partage.
10-Ladji Sirabada, Côte d’Ivoire
Mon blog, mes amis, le monde, la chaleur…
Parce que je blogue, j’appartiens à une communauté qui écrit et qui crie, qui saupoudre et qui fustige; une communauté qui arrange et souvent dérange, qui chante tout en interpellant, qui enseigne et renseigne, qui appelle et interpelle, qui éduque, distrait, et s’occupe…
Parce que je blogue, je convoque bon gré, mal gré une communauté qui se renseigne ou enseigne, qui partage ou s’enferme, qui se satisfait ou se plaint de, qui encourage ou insulte, qui consomme sans ou avec modération, qui dit merci ou merde, qui félicite ou blâme…
D’un coté ou d’un autre, en bloguant, je me mets à la croisée de plusieurs chemins. Chemins de confrères. Chemins de lecteurs. En bloguant, je partage mon monde ou ce qu’il y a à partager pour ne point me sentir seul.
Mon histoire du blog, commence avec la neige. Le blanc qui tombe et qui plonge le noir dans le lointain souvenir de la chaleur des terres ancestrales  et des miens.
En tombant, en m’enfermant dans un univers que je qualifiais  »aussi d’exotique », le blanc, m’a offert des pages blanches à remplir, m’invitant à me soustraire de la solitude, du dépaysement, d’un monde dans lequel, je me suis retrouvé, par concours de circonstance divine.
Mon blog fut, mon bois de chauffe. Il fut la vitrine de présentation de mon nouveau monde…
A chacun, je souhaite une expérience de blogging… Pour un monde plus ouvert, sans barrière et avec beaucoup de chaleur…
Je blogue; bloguons donc, puisque c’est la ten-dance.
11-Nelson Deshomme, Haïti
C’est une phrase magique qui a ouvert mes yeux sur le monde du blogging: « La beauté de l’internet c’est qu’on apprend en marchant ». Et dépuis lors, je fais de ce slogan ma principale source de motivation. En effet, le blogging est pour moi un centre d’apprentissage. Il m’est aussi un moyen de peaufiner mon écriture, et surtout d’apporter ma contribution dans la présentation d’une autre Haïti aux yeux du monde. Dorénavant, un blog est un instrument de communication où chacun peut placer son mot sur le dévenir de notre planète. Maintenant avec un blog, n’importe qui peut marquer d’une autre manière et de façon indélébile son passage dans ce monde.
12. Berliniquais, Martinique 
Pour moi, le blogging, c’est ma deuxième grande passion. Comme chacun sait, ce que j’adore par-dessus tout, c’est de chanter sous la douche. Mais malheureusement, quand je chante sous la douche, il n’y a personne pour m’écouter. C’est triste à mourir. En revanche, lorsque j’écris dans mon blog, le monde entier peut lire mes humeurs. Donc pour moi, écrire un blog, c’est un peu comme chanter sous la douche devant un large public ébahi d’admiration. Quel bonheur!
Parlons du blogging mais pas pour y consacrer un billet qui appelle, comme chacun le sait, chaque fois un sérieux et une application énormes. Il est tout simplement question de livrer son point de vue sur ce phénomène dont la fièvre a saisi le monde, singulièrement dans sa composante jeune.
Alors, c’est un avis très personnel que je vais livrer. Quand on me parle du blogging, je ne peux pas ne pas penser à dire que, dans un monde qui se débat dans l’entonnoir des crises politiques, économiques voire sociales, tenir un blog ne peut qu’offrir une possibilité de calmer la soif de s’exprimer qu’éprouvent des millions de femmes et d’hommes repartis dans tous les pays. Et surtout à un moment où les idées sont l’arme privilégiée dans la « guerre des places » qui oppose d’abord les grandes puissances, et accessoirement toutes les nations. Ainsi, le blog, en tant que site personnel, donne l’opportunité de prendre part à ce concert des idées qui animent le monde.
Pour le petit et modeste journaliste que je suis, qui tient un blog depuis bientôt une année, le blogging a été un espace où il défend ses convictions, sa position sur un sujet qui fait ou non la Une de l’actualité locale ou d’ailleurs. Et ce qui a le plus éveillé mon intérêt pour cette activité, c’est le droit à la subjectivité dont jouit le blogueur. Le droit de dire son ressenti du moment et ses impressions propres. Ecrire à la première personne du singulier (je) une analyse dans laquelle se retrouveront beaucoup de lecteurs, me parait plus responsable  que l’emploi du « Nous » que le journalisme trouve objectif, mais qui me semble manquer de sérieux. C’est aussi indiquer que le blogging est un espace, aussi grand que le rêve. C’est, bref, un déversoir !


Campagne pour inviter les égyptiens à Mondoblog

Crédit photo : Pascaline
Crédit photo : Pascaline

A la manière de Stéphane, de Mylène, et d’Axelle, il est grand temps pour moi de partir en campagne. Je m’adresse ici plus particulièrement aux égyptiens d’Egypte et du monde. Il est temps pour vous (et pour nous tous) de rectifier une grosse injustice : il n’y a pas un seul égyptien au sein de la plateforme Mondoblog : cette plateforme de blogueurs francophones qui nous permet de partager nos quotidiens, nos coups de cœur et nos coups de gueule ou simplement notre culture, d’origine ou d’adoption. A l’heure ou tous les regards sont tournés vers l’Egypte, j’en profite pour faire campagne, dans un tout autre registre.

Parce qu’il y a un vivier de jeunes francophones talentueux en Egypte qui ont des choses à dire, sur leur pays, sur leur culture, et sur le monde dans lequel ils vivent. Peu d’entre nous le savent, pourtant, l’Egypte fait partie de l’Organisation internationale de la Francophonie, et Alexandrie, la deuxième ville du pays, héberge notamment l’Université Senghor, bastion isolé de la francophonie.

Parce que nous avons constaté qu’il y a une guerre d’information qui se joue en Egypte et à l’extérieur, que les informations qui nous parviennent du pays de ne sont que partielles et subjectives, parce que les médias indépendants ont du mal à se faire entendre au delà des frontières.

Parce que nous, qui sommes à l’extérieur du pays, sommes mal placés pour avancer des analyses politiques improvisées qui seront automatiquement biaisées par l’informations que l’on reçoit. Parce que ces derniers temps, on parle beaucoup des égyptiens, voir « au nom des égyptiens » sans finalement trop leur demander leur avis.

Parce que nous aimons l’Egypte et sa culture, et que nous voulons la voir briller au delà des conflits politiques, au delà des révolutions, et aussi au delà des stéréotypes sur les papyrus et les pharaons. Ce n’est pas que ça l’Egypte, venez nous le prouver.

Parce que nous devons faire des ponts entre nos mondes, pour une meilleure connaissance mutuelle, qui sera la clé pour déconstruire nos préjugés : « monde-arabe », « monde-francophone », « monde-musulman », « monde-occidental », « monde  noir-africain », tous ceci ne sont que des mots, mais qu’y a -t’il vraiment derrière? 

Parce que Mondoblog est une aventure humaine, qui vous permettra d’échanger, de lire et même de rencontrer des blogueurs, 250 en tout, sans parler de toute la bande qui va nous rejoindre en septembre (et font déjà peur à René Jackson), originaire d’une trentaine de pays différents. C’est aussi la chronique « génération causante » tous les lundis dans Couleurs tropical, sur RFI.

Parce qu’un monde-o-blog sans égyptiens, est un peu comme l’Egypte sans les pyramides, un café sans chicha ou encore un marché conclu sans discussions.

Vous avez jusqu’au 7 septembre 2013 pour participer au concours.

 Yallah! Nous vous attendons avec impatience!

السلام عليكم

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Mon top 10 des plus belles chansons égyptiennes

Crédit image : Ghassen  Mtimet https://www.ghassenmtimet.com/
Crédit image : Ghassen Mtimet https://www.ghassenmtimet.com/

Un top 10 est forcément subjectif et incomplet. Aussi, aurais-je dû préciser, cet article vous présentera les 10 chansons égyptiennes les plus belles à mes yeux, connues où non, et dont je ne vous ai pas encore parlé. Il n’est qu’une excuse pour vous amener sur le vaste chemin de la musique égyptienne, que j’ai pu emprunter il y a quelques temps et dont je n’ai pu me détourner depuis.

C’est aussi un moyen, en cette période difficile dans ce pays, de vous renvoyer une autre image de ce berceau de la culture, où devrais-je dire, des cultures du monde. La musique n’échappe pas a la règle et il fût une époque où les grandes chanteuses arabes comme Warda l’algérienne, partaient en Egypte pour rencontrer le succès. Si j’avais intitulé cette liste « les plus grandes divas de la chanson arabe », elle y trônerait en bonne place, aux côtés de Fairuz la libanaise, puisqu’elles sont considérées ainsi, au même titre qu’Oum Kalthoum l’égyptienne. Mais ne nous écartons pas trop du sujet ! Voici donc ma sélection, pour vous emporter dans l’ambiance égyptienne, des salons feutrés des grands hôtels de luxe de l’époque, pour les chansons classiques, aux taxis bondés de l’Egypte d’aujourd’hui pour les chansons plus populaires.

La quatrième pyramide

Il est impensable d’écrire ce top 10 sans mentionner celle qui fût et qui restera sans doute encore très longtemps la chanteuse égyptienne la plus célèbre, la plus impressionnante et la plus énigmatique de tous les temps. On dit d’elle qu’elle est comme « La quatrième pyramide » en Egypte, et elle a même un musée à son effigie au Caire, qui expose ses tenues de scènes, ses célèbres lunettes, ou encore ses premiers phonographes. Je l’ai déjà nommée, Oum Kalthoum prend en toute logique la tête de ce classement, par son ancienneté, par sa renommée et surtout pas son talent. J’ajouterais que sa musique n’a pas pris une ride, et que si la chanteuse est décédée en 1975, sa musique continue de vivre, en Egypte mais aussi bien au delà. Ainsi, quand j’ai la nostalgie de l’Egypte, je vais m’asseoir dans ce petit bar a chicha de la plaine, à Marseille, pour écouter Oum Kalthoum. Si j’ai dû choisir une chanson pour ce classement, j’aurais tout aussi bien y mettre son répertoire tout entier ; chansons qui duraient en moyenne 55 minutes et qu’elle ponctuait toujours de longues improvisations lorsqu’elle les interprétait sur scène, un mouchoir de soie à la main.

https://www.youtube.com/watch?v=8viyFkMnEhQ#at=104

Le cosmopolitisme de la société alexandrine des années 70

La chanson qui suit à une histoire mal connue, mais reste pour autant un classique de la chanson égyptienne, bien que ses paroles soient en arabe, mais aussi en français et en italien. Elle représente très bien le cosmopolitisme de la société alexandrine des années 70, où les communautés italiennes, grècques, françaises côtoyaient les communautés coptes, juives et musulmanes de l’Egypte. L’histoire qu’elle raconte se déroule dans cette ville, dans le quartier Attarine, aujourd’hui surnommé le « quartier des antiquités », où l’on peut trouver tout à tas de bric-à-brac et même entrer dans un grand magasin ayant presque conservé tout son décor de l’époque. Mais il y eu beaucoup d’autres versions, dans d’autres films égyptiens, mais pas seulement. Des chanteurs espagnols, français, grecs, serbo-croates, ou encore cypriotes-truques l’interprétèrent dans différents styles musicaux. Plus récemment, il y eu même Jimmy Page, le guitariste du groupe Led Zeppelin qui en fit sa propre version, ou encore le compositeur  Nadeem-Shravan dans le film indien Aatish.

https://www.youtube.com/watch?v=cI_W_r-m8_4

Influences traditionnelles et modernes

Fathy Salama à puisé ses influence dans les musiques d’Oum Kalthoum, de Farid El Atrache et de Mohamed Abdel Wahab, les grands musiciens orientaux du 20ème siècle. Il s’est ensuite inspiré de grands musiciens de jazz lors de ses visites à New York et en Europe, pour créer une musique mêlant influences traditionnelles et modernes, Orient et Europe. L’une de ses plus grandes oeuvres est l’album Egypte, où il a collaboré avec le chanteur sénégalais Youssou Ndour. Album qui eut un grand succès dans le monde mais qui avait fait polémique au moment de sa sortie au Sénégal, une polémique expliquée dans le film « Youssou Ndour : I bring what I love ». La question qui se posait alors était de savoir si un chanteur populaire comme Youssou Ndour avait la légitimité de chanter Dieu et les grands marabouts. La réponse se trouve sans doute dans la beauté de cet album…

Une des plus grandes voix du répertoire traditionnel et sacré de la Haute-Égypte

Continuons dans le répertoire des chants sacrés. Cheikh Zein vit actuellement à Marseille. C’est ici que je l’ai connu. Je n’ai pourtant pris conscience de sa renommée et de la multitude de ses projets qu’une fois arrivée en Egypte, redécouvrant l’artiste sous un jour nouveau. D’une famille soufis de de père en fils, il est « une des plus grandes voix du répertoire traditionnel et sacré de la Haute-Égypte » comme le qualifie le site de Marseille-Provence 2013. Ses spectacles s’accompagnent parfois des danses des derviches-tourneurs, dont les tournoiement évoquent la course des astres autour du soleil. Il a également composé de nombreuses chansons avec le groupe Zarman fabriq.

https://www.youtube.com/watch?v=azNUVVASpo4

Une voix en or

Donia Masoud est Alexandrine, l’une des raisons de mon choix, et aussi sa voix en or, trop peu connue. Elle n’a peut être pas eu le succès qu’elle mérite, dit on dans la cité d’Alexandre où elle est née. Elle partira ensuite pour la capitale, pour chanter, jouer la comédie, et étudier la musique folklorique et la poésie arabe. Elle collaborera notamment avec la compagnie de Fathy Salama, qui aura une grande influence sur son art.

La scène indépendante égyptienne

Dans la même veine, Dina el wedidi est une chanteuse égyptienne contemporaine, devenue célèbre sur la scène indépendante, dans un mélange des genres accompagné par du violon irlandais, de la trompette ou encore de l’accordéon. La longue partie d’instrumental de cette chanson nous donne une petite idée de ce qu’elle doit dégager sur scène.

 Un amour pour son pays

Aida El ayoubi est une chanteuse égyptienne qui débuta sa carrière dans les années 90, mais qui fût une longue pause avant de revenir sur le devant de la scène, notamment grâce ses collaborations avec le groupe cairote Cairokee et leur « hymne à la révolution » « Ya el midan ». Elle a également réalisée un album de chants religieux «  Tawasul wa Ragaa’ bi Jah Sidna ». La chanson « A’ala Baly » est la plus connue de son premier album, très patriote, où l’artiste chante son amour pour son pays.

https://www.youtube.com/watch?v=jvIgqZnSBB8

Instruments, chants traditionnels égyptiens et musiques électroniques

Egyptian project est un projet musical issu d’une collaboration entre le  Nantais Jérôme Ettinger et le maître Mostafa Abdel Aziz qui participa à un autre projet connu, « Mozart l’égyptien ». Leur travail mêlent instruments et chants traditionnels égyptiens avec des musiques électroniques modernes. Le résultat sur scène est fabuleux.

Chanteur le plus populaire de la pop égyptienne

Dans un tout autre style, parmi les chanteurs les plus populaires de la pop égyptienne d’aujourd’hui, il y a Amr Diab et Mohamed Mounir. Amr Diab fut consacré par plusieurs chaînes de télévision arabes comme le meilleur chanteur arabe des années 1990. Il a également joué dans plusieurs films égyptiens, dont « Ice cream » d’où cette chanson est tirée.

https://www.youtube.com/watch?v=Z09fuhDrUz4

 Musique égyptienne contemporaine

Enfin, je ne pouvais clôturer cette liste sans mentionner le nom de Mohamed Mounir. Sa musique est très populaire en Egypte. Et je n’en connais sans doute qu’une infime partie, car il chante depuis fort longtemps et à traversé tous les styles musicaux, de la musique nubienne traditionnelle de sa région d’origine (la Nubie, au sud de l’Egypte) en passant par la pop, le jazz et le reggae. Je vous présenterais donc ici une chanson où il chante en duo avec The wailers et vous laisserais la possibilité de découvrir le reste de son œuvre qui, quoi que l’on en pense, mérite d’être connue si l’on veut avoir une idée de ce qu’est la musique égyptienne contemporaine. Car si l’on rêve encore de l’Egypte de la grande époque, où elle fût un centre culturel dans tout le Moyen Orient, on ne doit pas oublier que ce qui fait sa culture aujourd’hui mérite aussi que l’on s’y attarde…

https://www.youtube.com/watch?v=USof6piiMf0

Alors bonne écoute à tous !

 


Bon baisers de France

Auray, Bretagne, France. Crédit photo : Pascaline
Auray, Bretagne, France. Crédit photo : Pascaline

A l’heure ou le chassé croisé entre juillettistes et aoûtiens est la préoccupation essentielle de nos médias nationaux, je me suis demandées, justement ce qu’ils allaient chercher, tous ces touristes, dans notre beau pays, et surtout, ce qu’ils ne verraient jamais. Pour les novices, ceux qui partent en vacances en juillet sont appelés juillettistes, ceux qui partent en août, aoûtiens. Quant-à ceux qui ne partent pas, ils sont sans doute appelés pauvres et on ne parle pas d’eux à cette époque de l’année. Voici ma carte postale, un peu différente.

J’ai longtemps hésité avant de faire ce billet, et puis je suis tombée sur un article de notre madame Caraïbes de Mondoblog, sur le musée de l’histoire de l’immigration, à Paris. Dans les commentaires, Mylène posait la question suivante : « depuis quand ne peut-on pas critiquer le pays d’où l’on vient parce que l’on n’y habite pas ou plus, ou encore parce que l’autre veut nous dénier le droit de nous exprimer sur le sujet ? ». J’ai répondue à Mylène que cette critique était essentielle, parce que constructive, mais aussi très difficile lorsque l’on vit en France. Je pense qu’il est temps pour moi de m’essayer à cet exercice, en toute subjectivité.

 Car si l’on dit souvent que le choc culturel lorsque l’on voyage est aussi grand au retour qu’au départ, je dois vous avouer que je suis encore en plein choc culturel. Mais celui-ci est particulier car on parle ici de ma propre culture. Drôle de sensation que de se sentir comme un étranger dans son propre pays. Je ne pensais pas qu’un voyage de sept mois pouvait m’apporter autant de recul sur mon pays. Pourtant, j’ai rencontré il y a peu, une amie française ayant quitté la France plus longtemps, et nos constats étaient proches. Je me suis donc dit qu’ils méritaient peut-être d’être dit. Je vais donc essayer de retracer mon parcours pour vous en donner un aperçu.

Jour 1 ou l’impasse logistique

On remonte donc trois mois en arrière, à ma déscentes de l’avion en provenance de Dakar, lorsque je rentre en France, éloignée depuis sept mois. Je recherche dans l’aéroport, une carte SIM pour mon téléphone Wiko flambant neuf (merci Mondoblog). Je demande à tous les bureaux de tabac de l’aéroport, sans succès. Il n’y a pas de carte SIM dans l’aéroport le plus grand de France ! Alors qu’il y en à sur tous les trottoirs de Dakar, dans toutes les boutiques d’Alexandrie, mais ici, rien ! Je finirais, bien plus tard, pas dénicher une carte prépayée à côté de la gare de Lyon, dans un taxiphone dont le gérant m’expliquera que, soit il y a ces cartes prépayées, à 10 euros, soit les cartes classiques Orange (et autres) à 20 euros, mais qu’il faut activer la ligne en appelant un numéro. Enfin, pour les cartes avec abonnements, il faut les commander par internet, et trouver un autre moyen de communication en attendant qu’elles arrivent.

Je m’installe donc au Mc Do de l’aéroport, où l’on peut trouver trouver le wifi pour le prix d’un Coca, pour entrer en contact avec mes proches. Je remettrais mes idéaux altermondialistes à plus tard. Puis vient le temps de les rejoindre. Je prendrais d’abord le métro parisien, je passerais tant bien que mal, avec ma grosses valise, les portiques installés pour éviter les fraudeurs qui, parfois, empêchent aussi de passer ceux qui ont payés (ou les assomment malencontreusement). J’irais donc chercher mon tickets dans une machine, et me rappellerais avec nostalgie les comptoirs des bus dakarois, ou l’on paie directement son trajet à l’intérieur.

Enfin il y aura le train, où je me suis dit que ça ne pouvait pas être plus compliqué qu’en Egypte. J’avais en effet dû passer par le marché noir pour dégoter des billets Louxor-Le Caire et les payer presque deux fois le prix normal. Ici, pour acheter un ticket, le plus simple est aussi de passer par une machine, ou par internet pour acheter son billet avec sa carte bancaire. Encore faut-il que celle-ci n’ai pas disparu dans une sombre histoire de sac volé… Sinon on fait la queue au guichet, et on attend que le panneau lumineux nous indique que c’est à notre tour. Mais si l’on veut bénéficier du meilleur tarif, on doit acheter une carte de réduction, si on y à droit, ou bénéficier de tarifs préférentiels en payant nos billets par internet. Autant vous dire que si l’on n’a pas accès à internet, on est sacrément embêté. Où bon pour aller à Mc do avec notre Wiko…

Paris, France. Crédit photo : Pascaline
Paris, France. Crédit photo : Pascaline

Mois 1 ou l’impasse administrative

Il y a aussi eu le parcours administratif que j’ai traversée. Il y a eu d’abord la cacophonie des assurances, car en France, si l’on n’est pas assuré, on doit sentir une épée de Damoclès au dessus de notre tête : assurance sociale, assurance responsabilité civile pour les plus indispensables qui nous prémuniront des sommes à payer en cas de maladie, ou de dommages causés à autrui. Comme si je pouvais faire du mal à une mouche… Mais on doit avoir une assurance maladie (obligatoire) et une mutuelle (facultative) pour payer les sommes liées à notre santé que la première ne remboursera pas. Cependant, on ne peut pas prétendre à cette mutuelle, si la première assurance n’est pas en règle. Si l’on est sans logement et sans voiture, cela nous épargne au moins l’assurance voiture et l’assurance habitation.

Comment alors faire comprendre à mes interlocuteurs que je n’ai pas vraiment d’adresse fixe, car pas de travail mais qu’il me faut quand même une couverture sociale car justement je ne suis pas riche et donc pas en mesure de payer les frais d’hôpital en cas de problème. Peu importe, ceux qui sont déjà venues en France où qui y vivent doivent le savoir, la procédure est la procédure, et on peut difficilement y déroger, même à Marseille, ville réputée pour son système D et son économie parallèle. On prend son ticket, on attends pendant des heures. Les vigiles à la sortie, veillent à ce que personne ne s’énervent, ne « pète un câble » dans ce labyrinthe administratif où la situation de certains est parfois bien plus grave que la mienne. Triste rendez-vous citoyen. Au guichet, on me demande de prendre un autre ticket pour une autre file d’attente, et j’attends encore… pour finalement voir quelqu’un m’expliquer que je dois envoyer un dossier complet par la poste, et qu’ensuite, il sera traité, dans un délais d’environ un mois.

Il y a aussi l’inscription au chômage, qui doit se faire par téléphone. Donc si vous vous présentez en personne, pour savoir comment procéder, la personne au guichet de Pôle emploi, vous indiquera le téléphone au fond de la salle pour « prendre votre premier rendez-vous », ce qui signifie tout simplement que vous devrez repasser plus tard, lorsque vous aurez reçu la convocation à l’entretien-pris-par-téléphone. Vous me suivez ?! Et si, par malheur, une fois inscrits,  vous repasser demander un conseil,vous vous entendrez dire que vous êtes trop qualifiée pour bénéficier d’un contrat aidé, et pas assez précaire pour avoir une aide à la recherche d’emploi. Pourtant, lorsque je cherche justement un emploi, on me dit souvent que je ne suis pas assez expérimentée, ou trop jeune… Je ne comprend donc plus trop ce que je suis de trop ou de pas assez… !?!

Trimestre 1 ou l’impasse économique

Autre caractéristique de mon cher pays et de ma ville si l’on n’a pas d’argent : les moultes attraits de la vieille France et de Marseille, ses visites de monuments, ses ballades en bateaux, ses sardines et sa bouillabaisse, s’avèrent hors de prix et réservés aux touristes aisés qui débarquent en ce moment sur le vieux port, à l’heure de la Capitale Européenne de la culture. Pour ceux, qui vivent hors du tableau idyllique dressé pour l’occasion, il ne reste plus beaucoup d’options pour remplir les journées, en ce mois d’août ou même les chômeurs doivent prendre des vacances, contrains et forcés : aller à la plage, car elle est encore gratuite, au parc ou chez des amis. Les jolis cafés et restaurants français, que l’on en retrouve dans les films de Woody Allen, tellement charmants-et clichés- sont hors de portée. Les bancs publics, où l’on voit parfois l’héroïne s’asseoir un livre à la main, ont presque tous disparus. L’heure est à la marchandisation, et chaque espace de nos charmantes villes doit être rentabilisé par des activités génératrices de revenus. Et, si la misère est moins pénible au soleil, c’est quand même mieux si elle est le plus loin possible de nos yeux sensibles. Marseille à longtemps fait exception à la règle, populaire, inclassable, ingérable et insoumise, mais elle se fait rattraper doucement par la dure lois de l’investissement économique et nous avec.

Marseille, France. Crédit photo : Pascaline
Marseille, France. Crédit photo : Pascaline

Je me suis alors demandée, que diraient nos grand-parents, dans ce monde où je me sens déjà dépassée du haut de mes 25 ans…

Bon été au pays ou loin…


Quand le jazz s’invite à ma porte

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Lorsque je m’éloigne de la mer, c’est le plus souvent pour un retour aux sources, dans ma région d’origine. Et je ne manquerai pour rien au monde le festival de Jazz où j’ai passé mes premiers concerts, il y a quelques années de ça, dans le théâtre antique de Vienne. Non, ce n’est pas de la capitale autrichienne dont je parle, mais une charmante petite bourgade entre Lyon et Valence, en France, qui organise chaque année un festival de Jazz désormais reconnu mondialement.

 Ainsi, j’ai appris que le grand Miles Davis avait foulé la scène du théâtre antique en 1991, à ma grande surprise : Miles Davis chez moi ? Je n’en croyait pas mes oreilles ! Et l’édition de cette année nous promettait bien des surprises, avec des grands noms tels que Santana, Chucho Valdes et Buika ou encore Ben Harper. Il y avait même comme surprise, la venue de Rodriguez, ce chanteur de Détroit (USA) devenu symbole de toute une génération anti-apartheid en Afrique du Sud alors qu’il ne le savait même pas. Il est depuis devenu septuagénaire, héros d’un film, « Sugarman » et a fait de nombreuses tournées notamment en Afrique du Sud.

https://soundcloud.com/legacyrecordings/rodriguez-sugar-man

Je me suis donc laissée embarquer dans le swing du jazz à Vienne du 28 juin au 13 juillet. Imaginez un peu mon étonnement, lorsque j’ai entendu le jazzman reconnu Marcus Miller, qui a justement longtemps collaboré avec Miles Davis et depuis à fait son bout de chemin, me parler de Gorée et de la maison des esclaves où j’étais il y a quelques mois, avec mes camarades de Mondoblog. Pour la petite histoire, Barack Obama y était aussi il y a quelques temps.

Marcus Miller « petit génie de Brooklyn », à dédié une chanson à l’Ile de Gorée, pour y exprimer la tristesse et le malaise qu’il à ressenti dans cette « maison », devant la porte du voyage sans retour. Mais cette chanson, disait-il, voulait aussi exprimer la capacité des hommes à transformer quelque chose d’incroyablement triste et horrible, en une chose aussi magnifique que le jazz ! Il disait que cette porte symbolise la fin du voyage pour tous ces africains qui y sont passés, esclaves emmenés de force vers les Amériques, et le début d’un autre voyage pour tous les afro-américains, dont il fait parti. Je n’avais jamais vu les choses de cette façon. Je suis donc allé me pencher sur l’histoire du jazz pour comprendre tout le sens de son propos, et je n’ai pu m’empêcher de me demander si Barack Obama avait eu le même sentiment en passant cette porte.

L’histoire nous ramène à La Nouvelle Orléans, dans l’état américain de la Louisiane, dont je sais peu de choses sinon qu’il fut autrefois francophone et que ses maisons coloniales blanches aux hautes colonnes ornent les rues. Dans cet Etat du Sud, un événement marqua l’histoire de cette musique : l’adoption et le durcissement dans les années 1890 des lois ségrégationnistes, séparant les noirs des blancs, et interdisant aux musiciens noirs de jouer aux côtés des blancs. Les professionnels jouèrent alors dans des fanfares et orchestres noirs, comme si la musique avait une seule couleur et le passé une seule douleur… Mais Marcus Miller l’a bien dit, il est ressorti de ces périodes sombres de notre histoire, une chose positive. Le jazz à été influencé par cette histoire, de la période de l’esclavage, des champs de coton, et leurs chants de travail, à celle de l’exode rurale de ces populations noires fin 19 ème siècle, qui fera évoluer le blues et avec ça le jazz qui y tire son essence.

J’ai continué mon périple à travers la musique, à la manière de Soro et Vladimir dans l’Afrique enchantée. Je me suis donc arrêté en Californie, avec Marcus Miller qui m’a fait découvrir le jazz et a redonné à la basse ses lettres de noblesse. Puis j’ai voyagé entre Los Angeles, l’Espagne (Denia) et Lagos, avec Keziah Jones. J’ai aussi traversé un pont entre la France et le Liban, avec le trompettiste Ibrahim Maalouf, connu pour son mélange des genres entre Jazz, musique traditionnelle, rock, slam, funk et même métal. Il nous a offert ici une prestation plus classique, en écho à son album Wind, conçu comme une œuvre cinématographique. Il est aussi venu nous prouver par A+B sa profonde admiration pour Miles Davis et pour le film dramatique dont il a composé la musique, « Assenseur pour l’échafaud » de Louis Malle. Pari réussi, on a eu envie d’aller voir le film.

Enfin, dans mon voyage vers les Amériques, je suis allée jusqu’à Cuba pour écouter les mélodies chantantes de l’orchestre du Buena Vista Social Club. J’y ai ressenti l’ambiance des clubs de la Havane des années 40, où le chant, la danse, et la sensualité sont les maîtres mots, où tout le monde se laisse emporter par les rythmiques endiablées, et où la beauté n’a pas d’âge. Ainsi, mon regard s’est arrêté sur Omara Portuondo, 83 printemps cette année et qui à fait de cette soirée, un moment de grâce.

https://soundcloud.com/world-circuit-records/buena-vista-social-club

 Le jazz à Vienne aura été cette année remplie de belle histoires, derrière ses talentueux musiciens, et m’aura rendu fière de ma région, pouvant accueillir les plus grands spécialistes d’une musique centenaire.

Duo Ibrahim Ferrer, Omara Portuondo, accompagnés au piano par Roberto Fonseca


Egypte : La révolution vue par les médias, les égyptiens et par le monde

Que l’on soit en France, en Egypte où ailleurs, l’actualité n’a pas toujours les mêmes contours. Nous en avons eu la preuve ces derniers jours, dans la couverture des événements en Egypte. Tour d’horizons et analyses…

Crédit image : Amandine Marie
Manifestations à Alexandrie. Crédit image : Amandine Marie

Ici, je vois des médias qui crient au coup d’Etat militaire, là bas je vois des scènes de liesse 

« Après quatre jours d’intense mobilisation populaire en Egypte, un ultimatum lancé par l’armé au président Morsi, des nouveaux martyrs, le chef de l’armée, le général Abdel Fattah al-Sissi à annoncé à annoncé mercredi 3 juillet la mise à l’écart de Morsi. Dans le même temps, la feuille de route rédigée par l’armée pour amorcer la transition à été mise en place et un président de transition nommé, le président de la haute cour constitutionnelle Aldy Mansour.

Mais les prises de position sur ce qui s’apparente à une seconde révolution en Egypte ne sont pas si claires. Ici, je vois des médias  qui crient au coup d’Etat militaire, là bas je vois des scènes de liesse, de la joie, de la fièreté, qui n’a rien à voir avec les réactions que l’on peut attendre d’un peuple qui s’est fait voler le pouvoir. De ce pouvoir là, les millions d’égyptiens qui étaient dans la rue n’en voulaient plus. Car il a été incapable de répondre à leurs demandes depuis la révolution du 25 janvier 2011, à savoir « pain, dignité et justice sociale ». Et pour eux, ce n’est pas l’armée qui a fait tomber Morsi, mais elle n’a fait que mettre en œuvre la volonté du peuple. Plus je cherche à m’informer, plus j’ai la sensation que les informations qui nous parviennent à tous ne sont pas les même. J’ai la curieuse impression de revivre les rumeurs et la désinformation en temps de manifestations en Egypte, alors que je ne suis plus dans le pays.

Alors, est-ce une manipulation de la révolte populaire ? Une récupération du mouvement par l’armée à son compte ? Ou bien une manipulation de la part des médias occidentaux face aux intérêts économiques et politiques dans la région ? Pour me faire un début d’idée sur la question, j’ai demandé à mes amis du bout du monde, de me donner leur avis sur la situation depuis leurs pays respectifs. J’ai choisis de publier les avis de toutes les personnes qui m’ont répondu (par ordre chronologique), sans prendre position pour laisser au lecteur la possibilité de se faire un opinion, en apportant un maximum d’informations.» Pascaline, France, 4 juillet 2013.

Fière d’être égyptienne

« Pendant les quatre derniers jours a Sidi Gaber, Alexandria (« Tahrir » d’Alex) j’ai sentis que je suis très fière d’être égyptienne! Un peuple simple, determiné et qui veut juste bien vivre! C’était vraiment le beautiful Chaos!! Mais j’ai peur parce que je n’ai pas une confiance en l’armée! J’espère pour le mieux dans les prochains jours qui vont être critiques! Yarab (je demande à Dieu)!! » Rana Elsadek, Egypte, 3 juillet 2013

Peur d’un retour à l’injustice et au manque de liberté

« Concernant mon opinion et mes sentiments maintenant, en premier lieu je ne suis pas supportrice de Mohamed Morsi ou des frères musulmans, mais je pense que ce qui se passe en ce moment n’est pas la démocratie. Je suis contente que les gens soient heureux maintenant mais j’ai peur que l’injustice puisse revenir, comme j’ai entendu l’avocat défenseur de Moubarak (Farid El Deed) dire que maintenant, chacun saura que Mubarak était innocent ! Et malheureusement, le procureur général de Mubarak est de retour (Abd- El Majeed Mahmoud). Il était contre la révolution depuis le premier instant et il à jugé que Khaled Said (l’un des initiateurs de la révolution) était mort à cause d’une overdose de drogues alors qu’en fait il avait été tué par la police !

Donc pour conclure, j’ai juste peur d’un retour à l’injustice et au manque de liberté. J’espère que les gens se lèveront encore de la même manière qu’ils l’ont fait devant les frères musulmans. Donc à la première vue, vous verrez que c’est positif mais après réflexion, ça ne l’est pas. Je ne veux pas revoir Mubarak et son partie, je ne veux pas voir la police envoyer les gens en prison car ils expriment leur propre opinion.» Hasnaa, Egypte, 5 juillet 2013

Crédit image : Amandine Marie
Hélicoptère de l’armée survolant la ville. Crédit image : Amandine Marie

Morsi, Collor et Bonaparte

« Raymond Aron a dit en son temps qu’un vrai politologue devait être un bon historien. Il montrait par cette affirmation toute l’importance de l’analyse historique dans la compréhension des faits politiques contemporains, et même dans l’implantation des politiques publiques. Je vais donc me livrer à cet exercice pour le cas de la « destitution » de Mohamed Morsi en Egypte créant un parallèle avec le Brésil des années 1990.

En 1992, le parlement brésilien, motivé lui aussi par la clameur populaire parachevait la cassation – impeachment -du mandat du premier président élu au suffrage universel après plus de trente ans d’une atroce dictature militaire. Fernando Collor qui avait adopté une dure politique d’austérité économique bloquant les comptes courants et l’épargne des citoyens (ça ne vous rappelle pas la Grèce ?) fut éjecté de la présidence pour éviter la prison. La différence avec l’Egypte (hormis le contexte socio-culturel qui n’est pas musulman mais latin) c’est que le peuple connaissant parfaitement ce dont était capable l’armée confiait son destin au congrès. Un président fut démis de ses fonctions, mais la constitution ne fut en aucun cas suspendue. Au contraire, elle fut appliquée à la lettre. Le jeu démocratique fut respecté. Le Brésil comme l’Egypte sortait d’une dictature de plus de trente ans. En Egypte, et je conclurai sur ce point, le président a été destitué, le parlement dissous, la constitution suspendue. La légitimité des urnes usurpée.

Ne jouons pas avec les mots, car il s’agit bel et bien d’un coup d’Etat. Napoléon aussi fut porté par le peuple de France. Les médias brésiliens (Rede Globo) ont d’abord appuyé le « coupe d’Etat » disant que le président Morsi « avait appliqué les mêmes méthodes que ses collègues sud américains qui concentre le pouvoir », et donc, ils ont fait une forte apologie du coup d’Etat… par la suite, ils ont commencé à traiter cela comme un coup d’Etat s’alignant sur le reste des médias occidentaux. Mais je rappelle tout de même qu’il y a une différence entre médias occidentaux et stratégie internationale des pays de l’OTAN. » Serge, Brésil, 6 juillet 2013. 

Les acteurs extérieurs s’emploient a tuer dans l’œuf ce mouvement pour leurs propres intérêts

« Finalement (à Beyrouth) l’ensemble des communautés sont satisfaites et encouragent le soulèvement populaire égyptien. Deux mouvances sont contres ici: les salafistes qui, on peut s’y attendre, sont par principe contre toute autorité « temporelle » et les frères musulmans (ils sont peu nombreux au Liban) bien sur ! Une remarque toutefois, qui peut déboussoler un « occidental » : le Hezbollah s’est prononcé en faveur du peuple égyptien alors que par ailleurs il soutient le régime d’Assad face aux rebelles. Pourquoi? Parce que le Hezbollah se dit par principe contre un gouvernement musulman intégriste, ou même musulman tout court. aussi ne pas oublier que Hezbollah est chiite et les frères musulmans sunnites […]  Et puis il y a un autre point de vue plus large mais que tu connais sûrement si l’Occident ( USA/ Allemagne….) semble remettre en doute le coup d’Etat et son caractère « anti démocratique « , c’est que ce sont les USA qui ont armé les frères musulmans, et pas qu’en Égypte d’ailleurs … Ils se retrouvent par conséquent bien embêtés … Sans leur allié sous marin…

Et d’autres choses très très sympathiques : les autres pays arabes type Qatar, Jordanie, et la Turquie seront les derniers a approuver le soulèvement car ça veut dire que leur peuple bien opprimé pourra réagir de même. Ça va être difficile pour que le mouvement dure parce que les acteurs extérieurs s’emploient a tuer dans l’œuf ce mouvement pour leurs propres intérêts. […] je pense qu’il y a un réel risque de guerre civile, mais on dit que oui (le ramadan peut calmer les choses). C’est compliqué, quand on vit dans le pays sous le feu des projecteurs , on « vit » tout simplement et du coup bon, on dédramatise. Ici a Beyrouth ce n’est pas joli non plus, mais « tout va bien. » Leïla, une jeune franco-libanaise (dont les propos n’engagent qu’elle seule), Liban. 8 juillet 2013.

Résultante de la politique de l’Islam radical

« La révolution égyptienne Acte 2 ou l’été arabe comme certains l’appelle est la résultante de la politique de l’Islam radical. Il s’agit là d’une preuve de l’échec de l’islamisation dans un pays pourtant très religieux. Ceci devrait nous aider à nous poser des questions importantes comme l’islam et la démocratie sont-ils compatibles ou quelle devrait être le rôle de l’armée dans une nation. Dans tous les cas de figures, il serait difficile pour les frères musulmans dont les branches s’étendent partout dans le monde d’accepter à long terme un état purement laïque. Raison pour laquelle, tout consensus serait dur à trouver avec des parties plus libérales. Par ailleurs, il serait souhaitable que l’armée s’ingère moins dans les décisions politiques et retrouve sa place originaire. Cependant, si les médias tentent de ressortir l’image d’une Egypte divisée avec des populations très incertaines, l’exemple tunisien est un exemple à suivre car je l’espère réussira un processus normal.» Sinatou Saka, Bénin, 9 juillet 2013. 

Je pense que l’Egypte a raté son chemin démocratique

Y’aura-t-il encore la démocratie en Egypte? J’en doute. Avec un peuple qui sait déjà qu’il peut faire partir un président quand il veut et comme il veut, je pense que l’Egypte a raté son chemin démocratique. Depuis le début de ce «coup d’Etat militaire», je me demande vraiment où va ce pays. François Hollande, le président français, a eu un bilan catastrophique après sa première année au pouvoir. Mais, les français ne sont pas pour autant descendus dans la rue pour exiger son départ. Il y a eu des critiques, des manifestations « pour un changement ». Comment comprendre donc ce qui est arrivé à Mohamed Morsi, un président élu démocratiquement ?

Je suis dans un pays où le président à déjà passé plus de 30 ans au pouvoir. Je vous jure, je donnerai beaucoup pour avoir un Mohamed Morsi chez moi. Un nouveau président avec de nouvelles idées. S’il était au Cameroun, nous l’aurions laissé jusqu’à la fin de son mandat, pour voir ce qu’il pouvait faire. Au Sénégal, Ghana, les nouveaux élus doivent faire leurs preuves. Une année n’est jamais suffisant pour juger quelqu’un, surtout dans un pays de plus de 85 millions d’habitants comme l’Egypte. Maintenant, avec ce qui se passe dans la rue, les nouveaux dirigeants doivent faire le double, voire le triple de Morsi…
Josiane Kouagheu, Cameroun, 14 juillet 2013.

Crédit image : Amandine Marie
Manifestations à Alexandrie. Crédit image : Amandine Marie

Les prises de positions à l’intérieur et à l’extérieur de l’Egypte sont donc très divergentes. Même lorsque l’on prend le soin de les interroger, elles ne nous apportent pas toutes les réponses. J’ose espérer que la fête demeurera dans les rues égyptiennes, et que le peuple réussira encore à faire de grandes choses. Car la construction et le maintien d’une démocratie n’est pas un long fleuve tranquille et Rome ne s’est pas faite en un jour… 

 

 


Happy birthday mister président ou anécdote d’une soirée à la police égyptienne

Alexandrie, le 30 juin (Crédit photo : Corinne Grassi)
Alexandrie, le 30 juin (Crédit photo : Corinne Grassi)

Dimanche 30 juin 2013 sonnait la première année au pouvoir pour le président égyptien Mohammed Morsi. Dimanche fut un jour de protestation dans tout le pays, au bord de l’implosion. Pénuries d’essence, d’eau, d’électricité paralysent le pays, frustrent ses citoyens et rendent leur humeur morose. Certains annoncent la guerre civile, d’autre les suites de la révolution, ou des manifestations qui prendront sans doute fin pour le mois sacré du ramadan. Le compte à rebours à donc commencé. La journée de mobilisation a fait descendre des millions de personnes dans les rues, ressortir les drapeaux égyptiens comme au 25 janvier 2011. Mes amis ont aussi entendu des klaxons toute la nuit et vu des gens danser dans les rues comme « s’ils avaient gagné le superbowl ». On a aussi vu brandir des cartons rouges en signe de mécontentement, à l’adresse du président, dont le peuple (et la campagne Tamarrod, « rébellion ») demande le départ avant mardi  et promet de rester dans la rue jusqu’à ce qu’il « dégage » ( comme on pouvait le lire sur les pancartes).  

Dimanche, je me suis rappelée une soirée à la police égyptienne qui pourrait bien illustrer l’une des raisons de la colère des égyptiens. Elle fait état de pratiques policières occultes et d’intimidation pour que l’image de l’Egypte à l’étranger ne soit pas ternie. J’ai pourtant décidé de les mettre en lumière, car c’est le peuple égyptien qui en est la première victime. 

Alexandrie (Crédit Photo : Caroline Grassi)

C’était en avril dernier, quelques semaines avant mon départ d’Egypte. J’avais dû, suite à une mésaventure d’un sac volé, me rendre à la police égyptienne pour faire constater l’infraction et obtenir un document nécessaire pour les démarches administratives. J’étais avec une amie française, ma compagne d’infortune et un ami égyptien qui s’était gentiment porté volontaire pour nous accompagner et nous faciliter les démarches. Il aura fait les frais de sa bonne volonté.

Nous avons tout d’abord été reçus par un officier qui, en anglais, nous a fait subir ce qui ressemblait à un interrogatoire, à nous faire douter sur notre statut de victime.

« Où habiter vous ? Avec qui ? Vous habitez avec votre petit ami ? Où se trouve votre colocataire en ce moment ? Que faisiez-vous dehors à cette heure là ? » sont quelques unes des premières questions auxquelles nous avons dû répondre. Puis, la conversation s’est tournée vers notre ami égyptien, et a pris une tournure inattendue. Le policier était persuadé que celui-ci nous avait dit que la police du pays ne faisait pas son travail. Il s’est évertué à nous dire que ce n’était pas vrai, que la police faisait son travail et que ce qui nous était arrivé était exceptionnel. La conversation s’est ensuite poursuivie avec notre ami en arabe, et elle allait s’éterniser ainsi tout au long de notre folle soirée.

Moment de la déposition, le policier nous tend un papier et un crayon, et nous indique de noter ce que nous voulons, que notre ami traduira ensuite en arabe. Prises au dépourvu, nous notons en anglais que notre sac a été volé avec des papiers d’identité à l’intérieur et que nous avons besoin d’une déposition pour les déclarer volés. La tournure des événements qui suivront nous échappera un peu…

On nous présente un nouvel officier de police qui va devoir nous accompagner sur la « scène du crime » pour une reconstitution des faits. Nous objectons un peu, en disant qu’il nous faut juste un papier officiel, que nous avons fait le deuil de nos effets volés. Mais sans succès, nous serons bon pour un épisode digne de l’inspecteur Derrick ou des Experts.

Nous voilà tous les quatre partis, mes deux amis et le policier à l’air un peu gauche, qui parlera sans relâche jusqu’à notre retour au poste. Il nous faudra d’abord le déposer, avec notre voiture, pour une petite course auprès d’un de ses amis qui n’est pas trop loin de notre route. Yallah ! On n’a pas vraiment le choix de toute façon. Une fois ses affaires faites, nous voilà repartis dans le quartier où notre mésaventure a eu lieu, et le cow-boy nous fera son show. »C’est ici ? », demande-t’il. « Où exactement ? Y avait-t-il des commerces ouverts à cette heure là ? » Non, nous lui affirmons que tout était fermé et qu’il n’y avait pas âme qui vive dans les environs. Bien tenté, mais il en faudra plus pour décourager l’agent d’aller sonner aux portes des maisons ! Ouf, nous l’arrêtons à temps et nous rentrons enfin, persuadés que cette « reconstitution » n’aura servi qu’à nous faire perdre notre temps. Mais nous ne serons pas au bout de nos peines…

De retour au poste de police, nous sommes baladés de bureaux en bureaux et sans comprendre pourquoi, on nous informe que le grand chef veut s’entretenir avec nous. Yallah ! C’est reparti donc, dans le bureau du grand chef ! Il prendra tout de même la peine de nous demander brièvement en anglais notre histoire qu’il connaît déjà, puis nous ignorera à son tour, parlant en arabe avec notre ami sur des sujets n’ayant l’air en rien de concerner notre affaire. Il cherchait à priori à savoir qui il était et ce qu’il faisait avec deux occidentales, peu convaincu par la notion d’amitié.

Nous sommes à ce moment là toutes les deux assises sur le côté, essayant de capter quelques bribes de conversation, d’avoir une idée de ce qui se dit. Le ton du grand chef n’est pas très amical. Il fait aussi subir un interrogatoire à notre ami. Nous sommes finalement renvoyés vers un autre bureau où nous perdrons totalement prises avec la réalité. Assises à nouveau sur un banc, mon amie et moi sommes cette fois écartées du bureau des agents de police qui rédigeraient, nous l’apprendrons plus tard, une nouvelle déposition. Les autres policiers défilent quant-à eux, un à un dans la salle pour voir ce qui se passe et nous regarder de plus près…

Puis on nous explique qu’il n’y a pas de photocopieur au commissariat et que nous devons aller faire une copie de la nouvelle déposition si nous en voulons une chacune, et revenir ensuite la faire tamponner pour qu’elle soit « officielle ».

Nous revoilà dehors donc à la recherche d’un magasin de photocopie. Il est vers 21h et cela fait environ trois heures que nous sommes entrés. L’opération aura en tout et pour tout durée environ 4h. Après avoir finalement photocopié notre précieux sésame, nous nous remettons en route pour le commissariat et nous commençons à comprendre ce qui se passe.

 Notre ami égyptien nous explique qu’ils ont voulu avoir des informations sur lui, qu’ils voulaient savoir ses liens avec nous et qu’ils l’avaient plus ou moins accusé d’avoir discrédité la police à nos yeux. Nous réalisons peu à peu que notre présence ici, en tant qu’étrangère n’est pas anodine et que la plus grande peur des officiers est qu nous racontions dans notre pays nos mésaventures, que nous disions que le pays n’est pas sûr ou pire, que la police ne fait pas son travail. Nous comprenons alors l’attitude du premier agent à qui nous avons parlé, ou plutôt le seul à qui nous avons réellement parlé. Il a insisté sur le fait que le quartier où nous nous sommes faites volées était très sûr, qu’il vivait là bas et que c’était la première fois qu’il entend une histoire comme la nôtre. Il à aussi essayé de nous persuader que la police faisait son travail en Egypte et que nous n’avions aucune raison de penser le contraire.

Nous apprendrons aussi que le fond du problème est que nous repartions avec un papier indiquant que nous avons été volées, en Egypte. Ce « détail » sera donc omis sur la seconde déposition, qui indiquera seulement que nous avons égaré nos sacs, contenant nos papiers d’identité.

Puis un coup de théâtre viendra nous rappeler que l’aventure n’est pas terminée : le grand chef en personne appellera notre ami pour lui demander très cordialement où nous sommes, et ayant peur que nous repartions chez nous en renonçant à nos démarches devant de telles pratiques. Il lui signifiera que s’il a besoin de lui plus tard, il n’aura qu’à lui passer un coup de fil.

« Nous avons fait la révolution et rien n’a changé » nous dira finalement notre ami en rentrant de cette interminable soirée, une fois nos deux dépositions à la main. Nous avons alors à peine perçu ici ce que les égyptiens pouvaient ressentir face à de telles pratiques dans leur pays. Et pourtant, le malaise était déjà grand pour nous et le sentiment de ne rien maîtriser, d’être totalement dépassé par des enjeux que nous ne connaissions même pas étaient bien là.

 Entre Moubarak et Morsi, le système à changé mais les méthodes sont les mêmes. C’est ce que dénonce aujourd’hui son peuple à un an de son arrivée au pouvoir.

Il faut noter que les forces de sécurité avaient annoncé pour les  manifestations prévues le 30 juin, de ne pas prendre position pour le parti au pouvoir, mais pour le peuple, « tirant les leçons de leurs erreurs passées » (Club des officiers).